Notes sur Analogies, ''courts-circuits dans la chronologie'' ... anachronie, ''anatopie'', Bérenger Boulay : ""L'histoire au risque du hors-temps"". 3 liens : 1) Fabula.org Atelier de théorie littéraire; 2) you tube ''Les voyages de l'art'', Jacques Rancière et Jean-Philippe Cazier ''Soirées Coïncidences...'' ; 3) hal.science Paul Carmignani, ''parcours de l'espace-temps''

Publié le par Claire Antoine

                      Quelques notes/citations prises dans les liens 1 et 3     

 

                                       En Histoire... 

 

"On devine tout de suite le problème que soulèvent les analogies lorsqu'elles rapprochent des objets éloignés dans le temps: elle opèrent des courts-circuits dans la chronologie, elles constituent des anachronismes. Or l'anachronisme, selon le témoignage de Nicole Loraux, 

«est le péché capital contre la méthode (...) aussi l'historien se garde-t-il en général d'importer des notions que l'époque de référence est censée n'avoir pas connues,

et plus encore de procéder à des comparaisons - par principes indues - entre deux conjonctures que des siècles séparent.»  

 

                         L'anachronisme : «erreur sur le temps» pour Jacques Rancière.

 

«L'“anachronique” (…) est ce qui n'appartient pas ou ne convient pas au temps où on le situe. Là où l'inappartenance est indémontrable, c'est-à-dire là où il s'agit de savoir ce qui était ou n'était pas dans une tête, c'est la non-convenance qui est invoquée.
La démonstration de l'“anachronique” s'opère alors selon la logique poétique bien constituée, celle de la vraisemblance et de l'invraisemblance.
Mais la vraisemblance, comme la vérité, a changé de régime depuis l'âge romantique.
Au temps de Voltaire et de La Harpe, on explicitait les règles de vraisemblance auxquelles la représentation de tel type de personnage historique ou la peinture de tel temps devaient se soumettre.
Au temps de Lucien Febvre, la démonstration n'a plus à s'argumenter selon des règles, elle s'effectue directement. La description impose l'évidence sensible de ce qui est à sa place dans le tableau et de ce qui n'y est pas.
Dans la description de la vie quotidienne de l'homme du XVIe siècle, l'incroyance a le statut du détail qui jurerait. Elle serait comme un habit poudré dont on affublerait un rude seigneur médiéval.»

 

Jacques Rancière propose de parler, positivement, d'anachronie plutôt que d'anachronisme, terme négatif dont il réfute la pertinence: « Il n'y a pas d'anachronisme. Mais il y a des modes de connexion que nous pouvons appeler positivement des anachronies: des événements, des notions, des significations qui prennent le temps à rebours, qui font circuler le sens d'une manière qui échappe à toute contemporanéité, à toute identité du temps avec “lui-même”. Une anachronie, c'est un mot, un événement, un séquence signifiante sortis de leur temps, doués du même coup de la capacité de définir des aiguillages temporels inédits, d'assurer le saut d'une ligne de temporalité à une autre.» ( pour "mieux comprendre" l'idée rancièrienne de mouvement et identité cf lien 2 la video ) 

 

 

" L'analogie préférée de Braudel est sans conteste, celle qu'on peut appeler, à la suite de Paul Carmignani, la «métaphore américaine», qui combine distances temporelle et spatiale, anachronie et, si l'on veut, «anatopie». ( cf lien 3 "Notre rapport au monde environnant est modelé par le jeu, la détermination, réciproque et nécessaire, de trois registres : l’imaginaire, le symbolique et le réel (notion de boucle ; rétroaction).

(...)  Cette fonction d'irréel « est psychiquement et socialement aussi utile que la fonction du réel ». (G. Bachelard) « Il n’y a pas de relation naturelle, immédiate et directe entre l’homme et le monde, ni entre l’homme et l’homme. Il y faut un intermédiaire, cet appareil symbolique, qui a rendu possible la pensée et le langage. » (G. Dessons, E. Benveniste, L’invention du discours)

C’est l’aptitude de l’homme à opérer sur ce qui n’est pas lui, comme sur lui-même, un acte de symbolisation, qui constitue le processus même de la pensée, laquelle « n’est rien d’autre que ce pouvoir de construire des représentations des choses et d’opérer sur ces représentations » (Ibid.).

 

D’où, le rôle du langage : « C’est ce qu’on peut dire qui délimite et organise ce qu’on peut penser » [...] « Prise en elle-même, la pensée est comme une nébuleuse où rien n’est nécessairement délimité. Il n’y a pas d’idées préétablies, et rien n’est distinct avant l’apparition de la langue » [...] « La pensée n’est pas une matière à laquelle la langue prêterait forme, puisqu’à aucun moment ce “contenant” ne peut être imaginé vide de son “contenu”, ni le contenu comme indépendant de son contenant. »

(...) Ce qui illustre la thèse de Bakounine selon laquelle : « Dans toute l'histoire il y a un quart de réalité, trois quarts au moins d'imagination et [...] ce n'est point sa partie imaginaire qui a de tout temps agi le moins puissamment sur les hommes. »

De par le rapport originel et constitutif qu'elle entretient avec le rêve, le mythe et l'utopie, la culture américaine représente donc, un champ d'étude privilégié pour les partisans d'une épistémologie accordant à l'irréel la part qui lui revient de droit une fois admis et reconnu le fait « qu'avant qu'elle ne se donne un projet politico-économique ou constitue son pouvoir, toute société a besoin d'une puissance immatérielle, de symbolique, d'inutile », Maffesoli, La Contemplation du monde."

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