Poème 187 ''Si le passé n'existait pas''
Si le passé n'existait pas
Il n'y aurait plus d'origine
Et « Je » ne souffrirait plus
Il ne ferait plus souffrir la souffrance
Il n'endurerait plus que le fantôme
D’une souffrance sans objet.
« Je » serait éradiqué,
Arraché, dépouillé.
"Je" participerait à son propre retranchement,
Son ablation.
Privé.
Couper pour nettoyer, Donner vie.
Ecarter, dépasser.
Le passé ne pourrait plus se re – dérouler.
Ellipse du passé.
Eviction du monde auquel " je" se référait.
Erosion de la « personne » qui parle,
Ecritur' sans détermination.
Vague et informe
Qui au moment du saisissement
Se dessaisit de sa forme
S’éparpille par foudroiements qui se dissipent.
Non !
Je ne veux plus !
Ni ça ni ça
Plus
Plus jamais !
Sans début
La fin aussi disparaît
Sans voir
Sans pouvoir raconter
Sans récit
Sans mémoire
Sans histoire
La parole est à la tache d’encre
Qui s’étale
Qui finit par pâlir
Par disparaître
Absorbée par le buvard
Je chasse la guêpe de mon cou,
Son dard reste fiché dans ma peau
Pour aiguillonner ma douleur
Pour toujours.
Il y a urgence à penser à écrire
Prendre en charge des mots
S’immerger dans des espaces inconnus
Qui comblent l’attente
Mais le rythme des touches
Révèle l'absence...
Et le poème se dilue dans la pensée
Qui ferme jusqu’à demain
Sa porte chancelante.