Dans la collection ''Lignage'' des Editions Paraiges vient de paraître le ''Peau d'Âne'' d'Amable Tastu. Le poème dans son intégralité est tout d'abord présenté dans son contexte historique par Marie Daffini puis annoté et commenté par Claire Antoine. Lien Le blog de Claire pour un court extrait de l'analyse

Publié le par Claire Antoine

 Dans la collection ''Lignage'' des Editions Paraiges vient de paraître le ''Peau d'Âne'' d'Amable Tastu. Le poème dans son intégralité est tout d'abord présenté dans son contexte historique par Marie Daffini puis annoté et commenté par Claire Antoine. Lien Le blog de Claire pour un court extrait de l'analyse

                                                                   La quatrième de couverture

" En 1835, Amable Tastu, poétesse romantique née à Metz, s'empare du conte de Charles Perrault pour le réécrire à la lumière du XIXe siècle. Ce texte, qui s'apparente à un long poème, interroge, sans en avoir l'air, toute une classe sociale surprise par les mutations économiques et sociales qui caractérisent son époque.
Perrault nous amenait à faire la connaissance d'une princesse qui, pour échapper à une union incestueuse, n'avait d'autre choix que celui de s'enfuir de la Cour, revêtue d'une peau d'âne. Elle souffrait de la faim, du froid, et devait effectuer mille tâches ingrates pour survivre.
Amable Tastu réinterprète le conte en l'orientant du côté des conflits de classe. La jeune princesse, enfuie de la Cour, est confrontée à la faim, à la misère, aux travaux les plus ingrats. Elle découvre le culte de l'argent et des affaires, l'écrasement de l'homme par la machine. Elle vend sa robe " couleur du temps " devenue anachronique.
L'étude du poème d'Amable Tastu est une ouverture sur le monde du XIXe siècle et ses bouleversements. Chaque vers amène le lecteur à s'interroger, réfléchir et… comprendre. Le progrès, oui. Mais à quel prix ? Regard réaliste et sans concession sur son époque, avec humour, ironie et talent, Peau d'âne d'Amable Tastu est un conte, un poème, une page d'histoire, un univers à découvrir…

Texte présenté, annoté et commenté par Claire Antoine et Marie Daffini, membres fondateurs de l'Association des Amis d'Amable Tastu."

« Chaque texte greffé continue d’irradier vers le lieu de son prélèvement » Jacques Derrida

 

Au-delà de l’image de poète romantique en demi-teinte, un peu froide et raisonnable, imitatrice qui

 

colle  à la peau d’Amable Tastu, grâce à certains critiques masculins de son époque, essayons de la

 

considérer autrement, notamment à partir de sa réécriture du Conte de Peau d’Âne, le texte liminaire

 

de son troisième et dernier recueil en vers, paru au début de l’année 1836, intitulé Poésies nouvelles

 

(...)En s’inscrivant dans les pas de Charles Perrault, Amable met ses lecteurs au défi de juger la femme

 

*1 par son écriture. L’auteure qu'elle est prend non seulement le relais d’un homme, mais en plus cet

 

homme, cet "aristocrate", se déclare passeur, traducteur scripteur d’histoires orales populaires,

 

traces de temps immémoriaux. Il réécrit avec Peau d’Âne, en 1694, pour le public galant des salons

 

parisiens de la fin du XVIIe siècle, le mythe européen, ancestral de la femme-animal, enveloppé dans

 

d’autres sources orales et écrites plus récentes. Amable a donc bien conscience du caractère

 

palimpseste de tout écrit, ce qui invite à considérer la question de la relation entre l’écrivaine et la

 

femme comme futile et même mal venue.  Gardons néanmoins à l’esprit que si une œuvre n’est

 

évidemment pas réductible à la biographie de son auteur, celle-ci peut servir de révélateur et de fil

 

d’Ariane.

 

 

Il faut ajouter que comme toutes les femmes écrivains de son époque, celle qui revêt pour le plaisir de

 

ses ami·e·s, et pour une unique fois, l’habit de conteuse, se voit comme représentante de son sexe et

 

non comme voix individuelle. Le personnage principal du conte n’a par ailleurs, lui non plus, pas d’identité

 

propre. Le groupe nominal « Peau d’Âne » met principalement l’accent sur le travestissement, « le

 

masque ». Dans le corps du texte la jeune fille apparaitra aussi sous le terme de « princesse »,

 

désignant à la fois son sexe, sa classe sociale et sa position d’ être en devenir, ou sous celui

 

d’ « Infante » qui étymologiquement signifie : « celle qui ne parle pas encore ».   

 

Amable choisit pour sa performance de réécrire un conte parodique qu’elle a lu dans le Cabinet des

 

Fées, où la fée -marraine, qui en l’occurrence, représente le monde merveilleux, se révèle bien peu

 

savante. (...) Quand son personnage est amené à s’immerger dans les milieux bourgeois, parisiens de

 

l’après 1830, il réalise en apparence la totalité de ses désirs en termes de richesse et de

 

reconnaissance. L’insolente  réussite matérielle de la princesse-animal n’empêchera pas l’insatisfaction

 

de l’envahir au point qu’ aiguillonnée par un capricieux désir elle commettra l’irréparable et voudra au

 

cours du rituel social qu’est le bal, confronter ce qu’elle croit être la vérité de son être, rehaussée par

 

sa robe couleur d’argent, aux regards jusque-là bienveillants de ses ami·e·s.  …Tout comme le naïf

 

Candide de Voltaire, Peau d’Âne devra  alors fuir pour la deuxième fois le « meilleur des mondes

 

possibles ».  (...)

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