Poème écrit par le génial Claude Billon à l'occasion de l'hommage rendu à Kléber Drouhin en juin 2010 au Centre Culturel de Metz Queuleu. Image trouvée grâce au lien domcorrieras.fr LeBordel des Poètes pour le poème ''Le givre a les dents longues''
Le givre a les dents longues - Le Bordel des poètes
Claude Billon L'hiver a cabossé sa carriole c'est le Soleil qui l'a ébloui ! Le constat amiable est un poème. Pas besoin de tirer trop sur ses cordes, le son de la journée
https://domcorrieras.fr/dotclear/index.php?post/2019/02/15/Le-givre-a-les-dents-longues
Poème lu par Jean-Luc Antoine qui a été dans sa jeunesse '' de facteur'', lui aussi, déjà admiratif du talent poétique ( et photographique) de Claude Billon
'' O U I ,
ceux qui sont partis continuent à nous parler par-dessus notre épaule
à l'heure où tout est formaté dans la frime
mis au formol des formules faciles
des institutions qui zappent la poésie parce qu'elles ont peur de nourrir la liberté comme elles ont du mal à nourrir les pauvres !
O U I,
au lieu de compter les parts de marché,
comptez donc sur vos doigts
combien de fois vous avez envoyé une parole belle,
sensible,
amoureuse de l'autre,
un cri d'homme à homme
combien de fois vous avez un peu fleuri en vous
l'esprit de Verlaine...
Ah ! s'ouvrir à la bonté,
non en messin mesquin,
mais avec les clés de Kléber, O U I :
ouvrir et s'ouvrir à la beauté !
À l'heure où l'on vous veut asservis,
bagués,
sans doute pour vous suivre au GPS du nivellement...!
A l'heure où ça caille dans les neurones,
où l'esprit en prend un coup chaque fois dans ses vieilles manies,
vieilles rabâcheries
vieilles canailleries
et qu'on ne sent toujours pas en nous la vie respirante !
La poésie n'est la propriété d'aucun propriétaire,
Ses Drôles d'Oiseaux sont la vraie richesse du monde !
Mourir riche c'est avoir vécu comme des clampins,
vivre pauvre
c'est enrichir la vie !
La poésie ne sert à rien, disait Cadou,
mais elle permet l'amitié !
Ah! se réunir ainsi c'est se baptiser les uns les autres
et si la vie ne s'attarde pas avec les choses d'hier,
il est bon de se souvenir des personnages singuliers.
Kléber-Drouhin avait créé une revue de poésie
qu'il promena durant de longues années
sur le porte-bagage de son vélo
porteur des journaux de la France du Soir
entre la grande fratrie et le grand fatras
il y a place pour les grands petits bonhommes
ceux-là ne tiennent pas la poésie sur la défensive de Vauban,
mais sous la voûte de leurs propres épaules
ceux-là ne font pas claquer leur nom sur la flèche pompidouble,
ils sont les journaliers de l'anonymat...
Rues, venelles, impasses,
Ah ! j'ai des noms sur la langue,
en frère de liberté,
Oui à la rue Kléber Drouhin
A la venelle du facteur Roulin!
A l'impasse du clochard-Depardieu.
Oui, au square Vodaine !
Eux n'eurent pas le temps de chercher des poux sur la tête de l'autre...
Ni des piranhas dans le bassin de l'esplanade,
Eux, si étrangers à la plongée de la beauté humaine dans le mal,
ils baptisèrent leur ville
avec une onde salutaire, fraternelle, P O E T I Q U E
Et s'il revenait ici, chez nous, le pauvre Lélian, quel accueil lui ferait-on ?
Où sont aujourd'hui les témoins du mariage de la poésie avec le grand coeur ?
A force d'aimer Verlaine,
Jean Vodaine,
Kléber Drouhin,
se pourrait-il qu'un petit Prince de l'émotion, ce soir, les réincarne ? ''