Café littéraire de METZ. Rentrée 2010. L'APAC a reçu le messin Pierre HANOT, pour "Les clous du fakir"

Publié le par Claire

   
                                                                                                                
                                                           Photo http://www.salondulivrederouen.com/auteurs-2009/pierre-hanot
   ( copié/collé d'un article paru dans la Revue Plumes au Vent n°68)

A la brasserie du Grand Comptoir, à Metz, l'auteur aux dons multiples, interrogé par Nicole FAESSEL a conquis un public exigeant.
L'homme est tout sauf prétentieux. Il est précis dans ses réponses et recherche l'authenticité. On le sent profondément humain et comme il le dira lui-
même « en résonance », « tambour sur lequel frappent des événement ». Et c'est pour lui la définition de l'artiste, qui « regarde et écoute ».  
En mai 2008, au Salon de Caen, il est découvert par Pierre RAYNAL, et ses éditions, qui font référence dans le monde du noir et du polar. Le hasard a joué. P. HANOT relativise échecs et réussite. Il a conscience de la part de la destinée dans la vie de chacun.
L'auteur est aussi chanteur, guitariste, rockeur.  Il juge essentiel le contact avec le public, avec le lecteur, et se déplace volontiers sur les salons ou pour participer à  des cafés littéraires. Son  roman, " Les clous du fakir", dont le titre est aussi celui d'une chanson, raconte l'histoire de la vengeance effrénée d'un père qui a perdu sa fille unique. La jeune fille a été attirée dans une secte et son compagnon lui fait consommer une plante qui doit la faire entrer dans un monde meilleur...Le père, le héros est un dealer, au parcours difficile marqué par l'addiction, entraîné par le monde de la musique. 
 « Ce n'est pas un livre autobiographique », répond Pierre HANOT à Nicole FAESSEL qui veut savoir ce qui a pu lui inspirer une telle histoire. Et il propose deux pistes, deux faits pour tenter de percer   l'origine, la genèse de cette œuvre.
Le premier est un fait divers. Dans une secte en France, un adolescent meurt, par overdose, de la consommation d'une racine hallucinogène. Au Gabon cette dernière sert aux chamans, mais  détournée de sa fonction première elle est utilisée, en Europe,  par certains gourous.
Le deuxième, est la réflexion d'un détenu, rencontré par l'auteur lors d'un concert dans une Centrale, en France, et qui lui a dit, en substance : « Si quelqu'un avait fait à ma fille ce que j'ai fait à la fille pour laquelle je suis en prison, celui-
là ne serait pas passé par la prison.» Cet homme a tué, mais il pense encore en terme d'autodéfense, de vengeance, même s'il se « tire une balle dans le pied ». 
L'écriture ne permet pas le mensonge. Il a fallu à Pierre HANOT des mois d'exploration, de descente en lui-même, douloureuse, parfois, pour saisir, ressentir ce qui peut se passer dans la tête et le cœur d'un homme quand le drame est là. D'autres ingrédients ont contribué à faire de ce roman noir un petit chef d'œuvre, la nostalgie de l'enfance, celle de l'auteur et celle de sa propre fille, sa connaissance intime de l'addiction et aussi de l'univers de la musique, « avec tous ces gens qu' [il a]croisés ». Les lieux et les personnes qui les hantent  lui ont été inspirés par sa ville natale. Le patron du bar, un bar du centre ville, du côté de la Place Saint Louis de Metz, par exemple,  va servir de catalyseur pour le personnage.
Nicole FAESSEL - Le livre est conduit sans ambiguïté, la vengeance est inefficace, mais pour les lecteurs qui ont pu vivre de près ou de loin un tel drame, ne ramène-t-il pas la douleur ? Ne peut-on pas avoir peur d'y trouver une apologie de la vengeance ?
Pierre HANOT – Il s'agissait pour moi de témoigner de ma qualité d'humain, d'assumer, de prendre ma part, de me confronter à l'idée de la mort et de l'au-delà. Après, le lecteur aime ou pas. Cela ne m'appartient pas. L'auteur n'est pas un justicier masqué. 
Dans le roman, poursuit Nicole FAESSEL, l'impact de la musique est très négatif. 
Comment l'expliquer ?Pierre HANOT – Pour moi, la pire des choses est d'être optimiste. Si on l'est il n'y a plus aucune raison d'agir sur le fatum... Le pessimisme est beaucoup plus dynamique. Un pessimisme, bien entendu, raisonné et raisonnable.  Le livre n'est toutefois pas  monolithique. Plusieurs ruelles se croisent. Mais tout le monde ne s'y croise pas. J'ai voulu  aussi illustrer les rapports entre les artistes, souvent psychorigides et leurs enfants. Quand on n'a pas le temps de communiquer, on reproduit des schémas  anciens en contradiction parfois avec les propos tenus sur la scène, et qui font un succès. Ceci sans compter avec l'ego surdimensionné de l'artiste...
Dans l'assistance captivée des mains se lèvent : 
« C'est vrai, le propos est noir. »
PH – Un mélange d'ombre, de merde  et de lumière. Paradoxe. Les pires situations,  parfois désamorcées grâce à l'ironie. 
« J'ai été frappée par la richesse et la musicalité de votre style »
PH – J'ai la phobie de la répétition sous toutes ses formes. Mon écriture est  " abondante " dans un premier temps puis, à la relecture, il y a lutte pour supprimer les "verrues " qui alourdissent le propos.
Nicole FAESSEL  relance  la discussion : – Peut-
on se soigner  de la culpabilité ? 
PH – Dans les premières pages, le héros tue le gourou responsable de la mort de sa fille. Il lave ensuite ses vêtements. Le tambour rotatif du lave-linge nous entraîne dans des flashbacks d'événements de sa vie  et de celle de sa fille. En quoi n'a-t-il pas pu la protéger ? Nostalgie de l'enfance. Tendresse. Le bel itinéraire qu'il avait avec elle et qui mène au drame…
D'autres questions encore : « Quand écrivez-vous ? »
PH - La nuit, parfois, mais aussi le jour en continu, 6 à 8 heures d'affilée.
– Vous vous êtes inspiré des romans noirs américains ?
PH.– Peut-
être. Mais j'en ai lu très peu. 
– Réalité / fiction : peut-on les départager ?
PH – L'écriture à la première personne, celle du "je" est à certains moments une écriture de la douleur. Un rôle de décomposition. Borderline. J'ai morflé.
– Comment sort-
on   d'un tel livre ?
PH – Dans tous les cas, je ne relis jamais un livre terminé. Il m'est impossible de le faire sans en ressentir un certain malaise. J'en commence alors un autre.
– Vous faites des concerts dans les prisons...
R. – Dans la quasi totalité des prisons françaises, maisons d'arrêt, centres de détention. J'ai une certaine connaissance de la nuit, de la violence, et je sais qu'il ne peut y avoir de pseudo-
grandeur d'âme, que chez les prisonniers, la démagogie n'existe pas. Ils m'ont appris à être en sincérité. En lien avec mon univers artistique. Echange de vibrations. La prison devrait protéger la société, mais remplit-elle son rôle ? A mon avis, non seulement ce n'est pas le cas, mais elle produit le contraire. Et de l'autre côté du mur, il existe, pour chacun, la possibilité de déraper un jour. 
 – Avez-vous des projets ?
R. – Oui. Un nouveau roman qui paraîtra fin 2010/début 2011, et qui se déroulera entre 1948 et 2100...
Auteur à suivre donc. Les participants à ce café littéraire se sont ensuite précipités vers l'endroit où l'auteur a très gentiment dédicacé son roman. L'APAC aurait-
elle pu rêver d'une meilleure rentrée littéraire ?  

Claire Antoine .


Publié dans Activités diverses

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