Relais - Samedi 3 juin 2023 à 18 h Carte Blanche à La Maison de Verlaine - Lecture de ''Une nuit avec Paul Verlaine'' du symboliste danois Sophus Claussen (1896), traduit par Guy-Charles Cros. 3 Liens :1) pictural, ''La Cave du Soleil d'Or'' - rendez-vous des ''samedis de La Plume'' - 1892 de H. Evenepoel 2) ''Paris palimpseste'' de S. Briens 3) A. Bernadet, Verlaine et le malentendu symboliste
Posté sur Bing par Alberto M. | 4 mars 2021 | Le vin dans l’art ''Le sous-sol (ou la Cave) du Soleil d'Or'' ( 1892) de Henri-Jacques-Edouard Evenepoel (3 octobre 1872 - 27 décembre 1899) est un peintre belge.J'ai trouvé et copié/collé le commentaire sur le peintre bruxellois sur le site henri evenepoel - Bing images "Il étudie l’art à Bruxelles à l’Académie royale des beaux-arts entre 1889 et 1890, et entre en 1892 à l’École des beaux-arts de Paris. Il entre dans l’atelier de Gustave Moreau en 1893, où il prend contact avec Henri Matisse et Georges Rouault. (...) Ses scènes parisiennes montrent l’influence d’Henri de Toulouse-Lautrec et de Jean-Louis Forain.
La ville comme texte Quelles méthodes et quelles stratégies les écrivains utilisent-ils pour faire d'une ville un texte littéraire ? Italo Calvino décrit en ces termes le passage de la ville a...
Les mondes germaniques et les « villes-mirages » de la fin du XIXe siècle à nos jours « Villes-mirages » et espaces textuels Paris-palimpseste Les stratégies de Sophus Claussen et August Strindberg pour rendre visible et lisible le texte de Paris
RTICLE DE REVUE VERLAINE ET LE MALENTENDU SYMBOLISTE Arnaud Bernadet Revue Verlaine, n° 14 (2016), pp. 235-272 (38 pages) https://www.jstor.org/stable/48502058 Contribution from Classiques Garnier
Carte blanche : lecture d' "Une nuit avec Paul Verlaine"
Lecture à 4 voix (celles de Bernard Appel, Maïté Petit, Charles Thiébault et Bérangère Thomas) du chapitre IX de Antoine à Paris, Lettres naïves, un ''roman autobiographique'', à la forme non "classique" (paru en 1896) du poète symboliste danois Sophus Claussen (1865-1931).
Informations, à la demande, et par petites touches, sur le texte "symboliste" : paratexte/contexte/prétexte..., par Claire Antoine
La traduction du chapitre est du poète Guy-Charles Cros ( 1879-1956) qui vécut au Danemark avec sa mère, danoise, à la mort, en 1888, de son père Charles Cros, poète et inventeur français qui a participé, avec ses deux frères, aux dîners des Vilains Bonshommes et des Hydropathes ainsi qu'aux réunions du Cercle des poètes zutistes (qu'il recrée en 1883). Il a fréquenté entre autres poètes, Verlaine, Rimbaud, Jean Richepin, Alphonse Daudet, François Coppée...
Voyage- pélerinage - vagabondage
Comme de nombreux jeunes gens artistes et intellectuels, Sophus Claussen - il a 27 ans - se rend, en 1890, en France, à Paris, ville chaos, ville mythique, avec un ami, probablement Hermann Bang. Ensuite ils prendront le chemin de l'Italie.
Sophus Claussen écrit, il raconte son voyage et envoie ses Lettres - chroniques au journal Politiken de Copenhague, pour lequel il travaille comme pigiste, ce qui donnera "un roman" atypique intitulé Antonius i Paris (Antoine à Paris) paru en 1896. Le narrateur y est comme un "double" de Sophus Claussen.
Guy-Charles Cros, le beau-fils de Sophus Saussen, traduit en français deux chapitres du roman, ceux qui concernent Verlaine et en particulier une des soirées hebdomadaires de janvier 1893 de la Revue La Plume. L'autre chapitre traduit sera consacré au récit du septième banquet de la Revue La Plume, celui du 4 février 1893, présidé par Mallarmé.
La visite à Paris est un lieu commun de la littérature ( "On lit Paris" avant de le visiter, on sait... ) la promenade dans Paris est un rituel de visibilité sociale, le point d'orgue du temps mondain. Les lieux de déambulation sont des marqueurs de classe sociale.
Dis-moi où tu vas, ce que tu visites et à quelle heure et je te dirai ce dont tu pourras te prévaloir, et surtout, qui tu es...: Il y a le Trocadéro, Les Boulevards, Le Jardin du Luxembourg etc., le voyageur marqué par les écrits des romantiques va rechercher quelque rue détournée, pour y trouver de quoi frissonner.
Pour Claussen, le poète symboliste, ce sera la Rive Gauche, son Quartier Latin et ses cafés, la nuit, éclairée par quelques réverbères et pour plus de mystère et d'aventure "une descente" au Caveau du Soleil d'Or, pour y rencontrer Verlaine, le Maître incontesté du décado-symbolisme.
Le Quartier Latin apparaît dans le roman comme le reflet même de Paris, ville chaos, ville dangereuse et sale : "rêve délicieux" dans un miroir : "L’aménité d' un monde-miroir ; [mais pas vraiment...] là, il y avait suffisamment d’air à respirer, tendre et abondant ; et l’on pouvait aller là où l’on voulait, se mirer dans l’inconnu sans que le réel eût le verre d’un miroir ou une limite."
Contexte "poétique"
En effet, dans les années 1890, Claussen est fasciné par le mouvement symboliste, dont Mallarmé, Verlaine et Baudelaire - le précurseur (mort en 1867) - sont, à Paris, les figures de proue, et son effort poétique est animé par la recherche de correspondances. Parallèlement en France, on assiste à une montée en puissance de ce mouvement face au réalisme/naturalisme et à une quatrième génération de "romantiques". Les symbolistes qui essaient de se constituer en mouvement vont même se servir de lui pour une grande campagne publicitaire en quelque sorte, afin d'attirer une nouvelle génération de poètes. Inutile de dire que Verlaine n'aime pas trop ça. Il se moquera des "Cymbalistes" et de leur goût de la RECLAME
Le symbolisme/décadentisme/décadisme/esprit fin-de-siècle connaît de très nombreuses définitions. Chaque écrivain (poète,romancier, essayiste... ) chaque artiste ( peintre, dessinateur, affichiste...) a la sienne. En gros, il y a ce que l'on voit et le reste, l'invisible, l'illimité, l'éternel. Il y a les Idées et leur manifestations singulières concrètes.
On peut établir des liens verticaux, horizontaux entre les choses, les événements, les lieux, des déplacements, des souvenirs qui réinstallent le passé dans le présent. Un lieu en appelle un autre, une époque une autre. La vie s'enrichit... de miroitements, de reflets. Claussen veut garder ce caractère fugitif des choses. Il joue avec les mots aux résonances infinies.
Entre parenthèses la poésie stricto sensu symboliste n'est pas très audible. Mais en général, tous ceux qui se revendiquent de ce mouvement se font connaître par des écrits théoriques, politiques, des manifestes parce que les symbolistes qui sont individualistes ont des affinités spirituelles avec l'anarchisme, ils veulent faire de leurs mots "des bombes".
Ancrage baudelairien et swedenborguien
10Dans le poème « Correspondances », Baudelaire donne les fondements du symbolisme selon la théorie des correspondances de Swedenborg (XVIIIe) : il assigne au poète la mission d’interpréter les symboles présents dans la nature mais que les autres hommes ne peuvent comprendre. il existe des concordances entre la sphère naturelle, la sphère spirituelle et la sphère divine, et que le monde physique n’est qu’un symbole du monde spirituel. Claussen ne voudra toutefois pas d'une forêt de symbole où tout correspond. Le miroir pose problème. Les mots doivent garer leur aura suggestive.
L'histoire
Dans le Chapite IX, le personnage principal, en première personne, Antonius, double de Sophus et son ami quittent, un soir de janvier 1893, la Rive droite de la Seine pour se rendre Rive gauche, au Quartier latin, afin de participer à une réunion du samedi organisée par la Revue La Plume. Ils veulent y recontrer Verlaine, poète reconnu qui à cette époque-là n'est pas au mieux de sa forme physique, mais qui après une dizaine d'années d'oubli connaît un regain de popularité. Il écrit beaucoup. Il donne des conférences en Belgique, en Hollande...C'est la coqueluche du Quartier latin.
La méthode
Le poète danois dont la méthode consiste à connecter ce que tout le monde voit, connaît, entend pour créer une surprise, un monde un peu/vaguement différent...Son texte est une mise à l'épreuve de sa poétique. Pour lui, l'essentiel est de confronter les angles de vue à propos du même objet qui est ici Verlaine.
L’espace et la scène d'action sont importés de la vie réelle, mais la cartographie reste symbolique. Le quartier latin et le Caveau du Soleil d'Or existent et la rencontre avec Verlaine a eu lieu. Mais si le lecteur peut reconnaître dans la ville écrite des éléments de la ville décrite, son existence n’est que fictionnelle. La ville-texte est nécessairement une ville-mirage. dans laquelle des correspondances vont permettre de construire une cohésion dans un monde moderne aléatoire et inintelligible.
Le Quartier latin est une énigme à résoudre, guidée par l’interprétation des signes, par des correspondances.
Toutefois, dans le roman, Antonius, perdra sa "naïveté" qui consistait à penser qu'il est possible d’établir des correspondances entre les mots et "les choses" pour trouver la Beauté, la Vérité, l'Amour ...en se rendant compte que ce n'est pas possible. Le monde n'est pas plus lisible.
Sophus Claussen s'appuie beaucoup sur les répétitions, les clichés, les poncifs, comme autant de reflets du concret sur lesquels il s'appuie même s'ils sont "faillibles", et mortifères. Il recherche de "l'air", tendre et se refuse à garder le personnage de Verlaine dans des rets trop serrés, dans des mots fermés. Il passera entre maille, il trouvera une sortie.