Atelier Poésie - Séquence Marie Noël - première lecture de "Prière du poète"
Inspiration / "Muse": début de l'enquête
Dieu donne le "la" , comme Vénus pour Epicure/Lucrèce
il anime les éléments et Πάντα ῥεῖ, "Tout coule", "Tout passe"
et le coeur de la poète, touché, est mis en mouvement...
Elle absorbe, telle une pythie, ou une lyre, les émotions, les sentiments de toute la création qu'elle convertit, à laquelle elle prête "sa plume", qu'elle transforme en textes poétiques.
Je connais (le malheur) et je sais en parler ...
Il y a une immédiateté de "connexion"entre le don de Dieu, qui descend du ciel irradier la terre et sa capacité à elle, la médiatrice, à transformer cette énergie en mots, qui coulent et qui iront atteindre, toucher tous ceux qui les entendront.
Il me manque maintenant, mon Dieu, l'expérience du bonheur pour devenir "la nourrice" du monde entier, pour "rendre ma voix assez touchante" pour faire partager la joie.
Elle ne veut certainement pas être cantonnée dans le lyrisme élégiaque, et plaintif.
Et ... je me contenterai de son apparence.
Elle semble craindre de prononcer les mots du bonheur pour éviter, peut-être, qu'il ne s'échappe, ne devienne le "sale petit bonheur" de l'Antigone d'Anouilh.
"Sa trace au loin éclairera ma solitude"
On peut peut-être se permettre de dire, à ce stade de la réflexion qu'elle est, elle, la Muse de Dieu ???
( à suivre...)
Prière du poète
Mon Dieu qui donnes l’eau tous les jours à la source,
Et la source coule, et la source fuit ;
Des espaces au vent pour qu’il prenne sa course,
Et le vent galope à travers la nuit
Donne de quoi rêver à moi dont l’esprit erre
Du songe de l’aube au songe du soir
Et qui sans fin écoute en moi parler la terre
Avec le ciel rose, avec le ciel noir.
Donne de quoi chanter à moi pauvre poète
Pour les gens pressés qui vont, viennent, vont
Et qui n’ont pas le temps d’entendre dans leur tête
Les airs que la vie et la mort y font.
L’herbe qui croit, le son inquiet de la route,
L’oiseau, le vent m’apprennent mon métier,
Mais en vain je les suis, en vain je les écoute,
Je ne le sais pas encor tout entier.
J’ai vu quelqu’un passer, un fantôme, homme ou femme...
Mon coeur appelait sur la fin du jour...
Les rossignols des bois sont entrés dans mon âme.
Et j’ai su chanter des chansons d’amour.
J’ai vu quelqu’un passer, s’approcher, disparaître ;
Et les chiens plaintifs qui rôdent le soir
Ont hurlé dans mon coeur à la mort de leur maître.
J’ai su depuis chanter le désespoir.
J’ai vu les morts passer et s’en aller en terre,
Leur glas au cou, lamentable troupeau,
Et leurs yeux dans mes yeux ont fixé leur mystère.
J’ai su depuis la chanson du tombeau...
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Mais si tu veux mon Dieu que pour d’autres je dise
La chanson du bonheur, la plus belle chanson,
Comment ferai-je moi qui ne l’ai pas apprise ?
Je n’en inventerai que la contrefaçon.
Donne-moi du bonheur, s’il faut que je le chante,
De quoi juste entrevoir ce que chacun en sait,
Juste de quoi rendre ma voix assez touchante,
Rien qu’un peu, presque rien, pour savoir ce que c’est
Un peu – si peu – ce qui demeure d’or en poudre
Ou de fleur de farine au bout du petit doigt,
Rien, pas même de quoi remplir mon dé à coudre...
Pourtant de quoi remplir le monde par surcroît.
Car pour mois qui n’en ai jamais eu l’habitude,
Un semblant de bonheur au bonheur est pareil,
Sa trace au loin éclairera ma solitude
Et je prendrai son ombre en moi pour le soleil.
Donne-m’en ! Ce n’est pas, mon Dieu, pour être heureuse
Que je demande ainsi de la joie à goûter,
C’est que, pour bercer l’homme en la Cité nombreuse,
La nourrice qu’il faut doit savoir tout chanter.
Prête-m’en... Ne crains rien, à l’heure de le rendre,
Mes mains pour le garder ne le serreront pas,
Et je te laisserai, Seigneur, me le reprendre
Demain, ce soir, tout de suite, quand tu voudras...
Mais si tu veux mon Dieu que pour d’autres je dise
La chanson du bonheur, la plus belle chanson,
Comment ferai-je moi qui ne l’ai pas apprise ?
Je n’en inventerai que la contrefaçon.
Donne-moi du bonheur, s’il faut que je le chante,
De quoi juste entrevoir ce que chacun en sait,
Juste de quoi rendre ma voix assez touchante,
Rien qu’un peu, presque rien, pour savoir ce que c’est
Un peu – si peu – ce qui demeure d’or en poudre
Ou de fleur de farine au bout du petit doigt,
Rien, pas même de quoi remplir mon dé à coudre...
Pourtant de quoi remplir le monde par surcroît.
Car pour mois qui n’en ai jamais eu l’habitude,
Un semblant de bonheur au bonheur est pareil,
Sa trace au loin éclairera ma solitude
Et je prendrai son ombre en moi pour le soleil.
Donne-m’en ! Ce n’est pas, mon Dieu, pour être heureuse
Que je demande ainsi de la joie à goûter,
C’est que, pour bercer l’homme en la Cité nombreuse,
La nourrice qu’il faut doit savoir tout chanter.
Prête-m’en... Ne crains rien, à l’heure de le rendre,
Mes mains pour le garder ne le serreront pas,
Et je te laisserai, Seigneur, me le reprendre
Demain, ce soir, tout de suite, quand tu voudras...
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Ô Toi qui donnes l’eau tous les jours à la source,
Et la source coule, et la source fuit ;
Des espaces au vent pour qu’il prenne sa course
Et le vent galope à travers la nuit,
Donne de quoi chanter à moi pauvre poète,
Ton petit oiseau plus fou que savant
Qui ne découvre rien de nouveau dans sa tête
Si dans son coeur tu ne l’as mis avant.
Vous qui passez par là, si vous voulez que j’ose
Vous rapporter du ciel la plus belle chanson,
Douce comme un duvet, rose comme la rose,
Gaie au soleil comme un jour de moisson,
Si vous voulez que je la trouve toute faite,
Vite aimez-moi, vous tous, aimez-moi bien
Avant que mon coeur las d’attendre un peu de fête
Ne soit un vieux coeur, un coeur bon à rien.
Aimez-moi, hâtez-vous... J’entends le temps qui passe...
Le temps passera... le temps est passé...
Bientôt fétu qui sèche et que nul ne ramasse
Mon coeur roulera par le vent poussé,
Sans voix, sans coeur, avec les feuilles dans l’espace.
Ô Toi qui donnes l’eau tous les jours à la source,
Et la source coule, et la source fuit ;
Des espaces au vent pour qu’il prenne sa course
Et le vent galope à travers la nuit,
Donne de quoi chanter à moi pauvre poète,
Ton petit oiseau plus fou que savant
Qui ne découvre rien de nouveau dans sa tête
Si dans son coeur tu ne l’as mis avant.
Vous qui passez par là, si vous voulez que j’ose
Vous rapporter du ciel la plus belle chanson,
Douce comme un duvet, rose comme la rose,
Gaie au soleil comme un jour de moisson,
Si vous voulez que je la trouve toute faite,
Vite aimez-moi, vous tous, aimez-moi bien
Avant que mon coeur las d’attendre un peu de fête
Ne soit un vieux coeur, un coeur bon à rien.
Aimez-moi, hâtez-vous... J’entends le temps qui passe...
Le temps passera... le temps est passé...
Bientôt fétu qui sèche et que nul ne ramasse
Mon coeur roulera par le vent poussé,
Sans voix, sans coeur, avec les feuilles dans l’espace.
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Tout vient de Dieu; intériorité; la tête, l'intelligence sous la loi du coeur; du haut vers le fond du coeur réceptif et médiateur du poète;
Prière, requête; "deal"; humilité exigeante; certitude; tension entre respect et liberté.
Choix de l'acceptation "négociée". Ni révolte, ni soumission
Libertés consenties par rapport aux règles maîtrisées de la versification : jeu
Le poème de 17 quatrains, 2 distiques et un verset selon le schéma : (9x4) +(2x2)+(8x4)+1
qui interfèrent dans les trois parties du poème, séparées par une ligne de points de suspension
Partie 1 = (7x4) + Partie 2 = [(2x4)+(2x2)+(3x4)] + Partie 3 = [(5x4) + 1]
Ces trois parties se distinguent aussi par leurs mètres
Partie 1 : alternance alexandrins/décasyllabes
Partie 2 : alexandrins
Partie 3 : à nouveau l'alternance alexandrins/décasyllabes
Quant aux rimes elles alternent aussi en commençant par le féminin. Le verset final présente une rime féminine.
Enjambements fréquents inattendus. Antithèses; chiasme, sur le fil
*
Exercice 1 : insérer ces structures
Donne-moi...
Rien qu'un peu, presque rien
Donne-m'en !
Prête m'en !
Ô toi qui donnes ...
*
Exercice 2 : 2 quatrains l'un en alexandrins et l'autre alternant alex/déca