(Association Plumes à Connaître) Rencontre avec Paul BLANQUE (P.A.V. n°71 décembre 2010)
Paul BLANQUE
...auteur, en particulier, de plusieurs romans parus chez Maël éditions. l'Oeil de Shiva, ( Roman d'un voyage entre deux); Ôm, (Roman d'un voyage au coeur de l'Himalaya); Sur les pistes du Petit Tibet, (Roman d'un voyage en terre tibétaine); et le dernier, La sacrifiée de Yuan Shao, ( Roman d'un voyage en terre chinoise). Vous pouvez le retrouver sur son site personnel semellesdevent.net. Ce site héberge aussi l'APAC.
J'ai privilégié dans l'oeuvre de Paul Blanqué le lien qui existe entre l'écriture et le voyage . Comment passe-t-on de la vie, de l'action à l'écriture ? C'est ce mystère de la fabrication d'une oeuvre que je cherche à élucider.
Paul Blanqué, quand on aime, quand on est en recherche de quelque chose, malade ou pauvre, il faut partir ? -Nombreuses sont les barrières, les limites psychologiques ou géographiques que l'on s'impose consciemment ou inconsciemment. Les préoccupations de la vie quotidienne, le côté financier, la famille, les amis, la santé...s'opposent à notre envie de partir et nous poussent dans nos retranchements. Mais dans notre for intérieur, une petite voix nous pousse à chaque instant, à franchir le pas de notre vie de citadin ordinaire.
Ecrivain voyageur ou écrivain en voyage ? - Tous mes ouvrages sont des romans dont le fil conducteur est un voyage. Ils sont inspirés par des choses qui troublent, bouleversent, désorientent ou orientent le voyageur. Dans mon dernier opus, par exemple, le phénomène déclencheur fut la mort d'un nouveau né, une fille, abandonnée, dans la neige, en pleine rue. J'ai ressenti le besoin vital, viscéral, de purger ce que j'avais vu, par l'écriture. Il me fallait parler du comportement indifférent de la petite société qui empruntait le boulevard et qui vaquait à ses occupations...et aussi donner à ce bébé une biographie. Elle est devenue l'héroïne de mon roman, La sacrifiée de Yuan Shao.
Alors, c'est en quelque sorte votre oeil qui tient la plume ? -Quelque part, oui. Je travaille tous les matins, entouré de mes personnages, de mes notes de voyage et surtout des photos souvenirs de mes plus belles rencontres avec des gens croisés sur les routes de Chine. Tirées sur papier et posées sur mon bureau, elles sont des fenêtres ouvertes sur un monde que j'ai laissé là-bas. Elles participent à entretenir un trait d'union entre trois univers : la Chine, l'écriture et moi-même. Par ailleurs, je mets au point actuellement les derniers détails de l'exposition-photo, intitulée "Ma Chine", qui a été présentée en avant-première au salon de Biarritz.
Pourquoi n'engagez-vous pas vos ouvrages à la première personne, puisque vous relatez votre vécu ? - C'est paradoxal, mais je ne supporte pas le "Je". Le lecteur recherche deux choses dans la littérature populaire : du romanesque et du vécu. Mais dans tous les cas une histoire qui le fera vibrer. Les romans de voyage tels que je les écrits, ont la particularité de mêler les deux. Le romanesque, par le côté romancé de l'écriture de l'aventure vécue et le vécu, par l'authenticité des situations, des rencontres, du quotidien, des ancdotes, des senteurs...Ce qui fait un pays dans toute sa spécificité. Cependant, pour être clair, il est vrai qu'en ce qui me concerne, je préfère l'écriture à la première personne de Nicolas Bouvier à l'exotisme documenté et aux personnages merveilleusement construits de Fénimore Cooper, le Balzac américain...
Vous parlez de rêve ou de réalité ? d'écriture ou d'aventure ? -Cela revient au même ! Le rêve est un voyage que notre esprit façonne, entretient, exploite à son corps défendant. Le voyage est également un rêve ou l'aboutissement de celui-ci. Ceci dit quand on voyage, ce sur quoi on ne peut pas faire l'impasse, ce sont les détails de la vie et du quotidien; alors, autant en rendre compte avec précision. On ne se nourrit pas de la même façon à Pékin et au centre de la Chine. Les coutumes sont différentes d'un pays à un autre. Les rencontres génèrent des cérémonials qu'il est important de respecter. Il faut peut-être dire aussi que j'ai forgé mon écriture en écrivant pour la presse où il faut relater scrupuleusement, mais aussi intéresser le lecteur, de donner de la résonance aux faits.
Quels sont vos auteurs favoris ? Votre livre de chevet ? - Je n'ai pas d'auteurs favoris, mais des livres que j'apprécie vraiment ! Soied'Alexandro Baricco, pour n'en citer qu'un...Côté musique, j'adore Mozart. Je déteste Wagner. Quoi de plus palpitant que "L'élixir d'amour", acte 2 de Gaetano Donizetti. Et Brassens, Brel, Ferré...
Avez-vous un livre en préparation ? - Oui. Deux pour être exact. Dans le premier, l'action se situe en Chine....et pour le second, en France.
Pouvez-vous nous livrer certaines phrases qui hantent votre imagination et vous renforcent dans votre désir de partir et d'écrire. -"Qu'il soit bouddhiste, chrétien ou musulman, c'est d'après la réponse qu'apporte sa vie quotidienne que dépend son statut parmi nous." ( Rinchen Lhamo )
" Le voyage a plus d'importance que le but." ( vieux proverbe tibétain )
" Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu'au jour où, pas trop sûr de soi, on s'en va pour de bon. Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu'il se suffit à lui-même. On croit qu'on va faire un voyage, mais bientôt c'est le voyage qui vous fait ou vous défait. " (Nicolas Bouvier - L'Usage du monde).