Extraits de ''Testament poétique'', 2020 . ''Greffons'' ''enivrement de chants pluriels'' pour une longue promenade méditative
(lecture publique d'extraits le 7 mars 2020, à Pontiffroy poésie, au moment du Printemps des Poètes)
Greffons
Enivrement de chants pluriels
"Au cœur d'un corps à corps
de citations élaguées,
mémoires réajustées arraisonnées;
tracés de cantilènes compilées réagencées
qui résonnent sur des partitions retrouvées'',
je t'invite, lecteur, à l'exploration d'un espace intérieur, en retours et avancées en profondeur et apparitions cadencées, paroles de mémoires conjuguées. À la recherche du lieu de la pulsation où la parole résonne en chant."
Claire
(...) Si mes mots
Sentent pousser ces murs
- Ces murs
Sans fondations
Ces murs
Tressés aux lianes grimpantes du lierre
Aux chardons et aux bleuets
Cherchant à raconter leurs explorations
Aux tracés effacés
Crayonnés -
Ils s’effriteront…
Alors je pourrai bâtir d’improbables rencontres.
Et s’incarneront
Dessins
Sonores
Retenus dans les ajours
Qui trouent incertaines
Le cœur de l’épure.
Par mes mots
- Qui peinent à s’envoler -
Je prends figure
Je prends visage
Visage
Epais mais incomplet
« C’est toi ! »
Peut-être…
Quoi de moi ?
Je me déploie, je tisse
La chancelante toile
Scintillante de gouttelettes
Graciles qui hésitent à tomber
Je pèse sur moi
Langage et corps continués, débordés…
Ephémère bâtisse
Maquette en carton
Rythme projeté
Hors de moi
Je colle, je coupe,
Je fusèle
Avec mes doigts
Je me dessaisis
Je me dépossède
Des piquants étriqués.
Pour d’autres oreilles
J’ouvre les grilles
J’écarte les barreaux
Je me libère
Dans les trouées de l’air
Du poisseux couvercle
Qui écrase les plafonds
Aux poutres symétriques
Et je navigue sous l’horizon crépusculaire
D’où j’espère remonter
Dans la transparence
D’une forme qui s’anéantit
Et se renouvelle
Pour te rejoindre
Faire entendre ce qui est
Supprimer la distance
Oublier. Trahir.
…Insurmontable entre les êtres
Incontrôlable.
Mots images d’objets aphones
Mimant le vif
Donnez-moi l’idée de la voix qu’ils prendraient
Ceux qui n’articulent aucun son…
Par l’écriture
Je me téléporte d’un objet à un autre
J’ai mille visages, mille voix,
Je suis grosse de l’écume aphrodisiaque
Mélange de la semence et du sang du ciel marin
Des fleurs à l’aube dans le vase.
Et je traine derrière moi le nébuleux entortillé.
Discontinuer les phrases
Les effondrer
Les déposséder de leurs convenances
Pour qu’il ne reste plus que
Déchets
Recyclables
Transformables.
Tricoter, tisser pour un réel
Amoureux, désiré.
L’histoire d’Ulysse s’écrit chaque nuit
Des nuages, des montagnes, des frondaisons
De l’alignement arrondi des côtes
Naissent des branchements nouveaux
Qui se croisent
Nervures, de fission et de déflagration
Et je rêve, paisible,
A tout ce qui survivra à mon absence
Sans début et sans fin
Dans l’inachèvement indéfini du réel.
Jouissance, habitée par la lettre et la mort,
Effrayée par la plénitude
D’un mystérieux sentiment
De non-présence à moi
Sans brouille et sans embrouille
Séparation
De la multiplicité sans chaos...
Je fais résonner mon appel
Désespérément
Glisser sans appuyer
Sans passage assuré
Comme des patineurs
Sur des étangs gelés
Au début du printemps
Dans l'attente d'une parole
Qui chasserait ce qui en moi
N’est pas moi
Etoufferait
Mon « autre » ;
Je parle pour trouver où me reposer
Où commencer à vivre
Où arrêter ces signes
- Où rien n'est gagné d'avance -
Qui me renvoient
D’un spectre à l’autre.(...)