"Carte blanche" au poète Jacques Engelmann
Jacques Engelmann, poète croyant et homme d'action,
engagé dans le monde associatif caritatif
La soirée s'est déroulée au rythme de la lecture d'un choix de ses textes par le poète lui-même, et de "commentaires " musicaux, laissés aux bons soins du trio formé par Jeanine Maingot, (violon) Jean-Pierre de la Gracière, (violoncelle) et Bérangère Thomas (chant). Entre autres, un magnifique Ave Verum !
Elle s'est terminée par un moment d'échange sincère entre le poète et ceux qui étaient venus pour l'écouter. Merci !
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A la suite de tous les poètes qui ont "ouvert en (lui) des horizons nouveaux" Jacques Engelmann est à la recherche d'un langage qui "perce les secrets de l'amour" et "comble un désir infini". "Brûler les mots avec la flamme des poètes pour éclairer le monde des vivants".
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Pour en savoir plus lire l’interview du poète par Jean DORVAL pour le site La Tour Camoufle " La Lorraine au cœur du monde", éditée sous le titre
" Le poète des P'tits gars de la rue"
Ci-dessous, la courte introduction/présentation que j'ai faite du poète et de son œuvre. Un peu de ce que m'a inspiré la lecture de deux de ses recueils
Vous avez été militant politique, actuellement membre des équipes de la rue, de l'Evêché, et aussi poète, auteur, à ma connaissance, de 4 recueils Pain, Amour et poésie, Eclosion, Vivant et Jusqu'à plus soif. Membre notamment de l'Association Plumes à Connaître, vous fréquentez les salons littéraires où vous faites souvent, aussi, de belles rencontres.
En ce qui me concerne, j'ai connu quelques-uns de vos poèmes à l'occasion des "Instants poétiques" de Radio Jerico il y a 3 ans et depuis j'ai lu deux de vos recueils, le premier, qui date de 2003 et le dernier, de 2011. Ce qui est intéressant puisque votre écriture s'inscrit dans un cheminement spirituel et une évolution formelle.
Le recueil, Pain, Amour et Poésie contient des textes - précédés ou suivis de dates -aux mètres et longueurs variés qui s'affichent clairement comme poétiques, en vers libres, regroupés la plupart du temps en stophes : à la fois respect et liberté
et Jusqu'à plus soif, où des phrases, réflexions, aphorismes, versets se succèdent, précédés d'un tiret - avec des retours à la ligne qui disent le souci que vous avez d'inciter vos lecteurs à les penser comme poèmes, sans classement apparent, d'intensité variable, jusqu'au dernier moment, à la dernière page, où l'on découvre un poème plus long, organisé en strophes, daté, avec un titre "C'était avant" . La quatrième de couverture assume votre projet : "Un livre qui n'a ni commencement ni fin"; qui a un goût d'éternité, d'alpha et d'oméga, dont l'après, l'aujourd'hui est réduit au silence, à vivre et à écrire...
Si l'image du "poète funambule" peut apparaître comme un lieu commun, vous la revivifiez en l'habitant complètement entre un temps scandé et un temps dilué.
Entre l'action et la contemplation. Entre les angoisses qui torturent et soumettent à la tentation du vide, du rien, du doute, de l'abandon et les moments rassérénés de plénitude, de joie, d'amour et de foi... tenant le balancier de l'écriture entre vos mains de poète ...
Les thèmes
L'écriture qui prend à son compte et dénonce les dominations, les souffrances des hommes, qui trahit des angoisses et s'essaye à dire le mystère, trésor du poète qui rejoint celui de tous les hommes à commencer par les plus démunis
Dire le mystère et l'offrir en premier lieu, à la fois, comme une interrogation, mais aussi, dans un élan d’humble et confiant abandon, comme une prière.
Car il s'agit de vivre alors qu'on est écrasé, ... de se remettre debout
Nous ne sommes pas uniquement des êtres de contemplation dites-vous. Car pour vous l'action est indispensable
Ces poèmes sont de maintenant, d'ici, au croisement du temps et de l'espace dont vous explorez les profondeurs pour en tirer des "Je t'aime"... parfois dans un voyage immobile, les yeux tournés vers le dedans, avec arrêt à la fontaine, pour tenter d'apaiser une inextinguible soif - qui débouche sur un retour douloureux au réel où vous débarquez à nouveau, alors "sans points d'appui".
La douleur du réel a parti lié avec l’angoisse " cette garce au rire hystérique qui nuit et affaiblit", elle envahit "cette proie facile" ..." qui se noie dans l'océan de (s)es pensées". L'angoisse de dire, ou qui précède le "dire", la vérité qui peut dans la lumière crue et aveuglante se retourner devenant mensonge, tromperie...
Des poèmes engagés avec des allusions précises à des faits connus de tous, symboliques, la Révolution de 89, Verdun, Auschwitz, la mouvance "soixantuitarde" avec sexe, musique et drogue.
Une critique claire de sociétés où se débattent maîtres et esclaves, du monde du "Travaille et tais-toi, ou sinon je te saigne", de la télé qui fait oublier et conditionne, de l'environnement qui rend fou... Machines, ferraille et bruits de bottes.
Vous revendiquez l'amour comme bataille contre la banalité
Les épreuves sont acceptées dans la perspective d'une révélation de l'être, relié à Dieu. "J'aurais souhaité souffrir jusqu'à l'enfer". La renaissance, l'énergie retrouvée, après avoir été au bout de la souffrance, qui apparaît comme une épreuve de vérité permettant d'échapper au nihilisme qui lui, " utilise" les mots en leur enlevant toute leur force par incapacité/impossibilité d'aller au bout, qui reste dans l'écume des choses.
Ce qui va de pair avec le choix d'une vie sur terre les yeux levés, en abandonnant le regard du sage épicurien de Lucrèce qui se laisse envahir par sérénité et doux plaisir quand il constate de loin, à quels malheurs il échappe.
Une autre idée forte des poèmes est celle de l'effacement, effacement du corps, idée des Saintes Ecritures de la graine semée qui doit mourir pour donner racine à la confiance; et de la transparence, à la fois terreur et supplication : "Je ne veux pas disparaître" mais aussi relation profonde et vraie avec sa femme, dans le regard et le souffle divin :
"On s'est tout de suite parlé avec les yeux
Et l'on dédia notre amour à Dieu"
Je m'arrête là...laissant la place au poète et aux poèmes eux-mêmes.
Il y aurait tellement d'autres choses à dire, tant votre poésie est habitée par des questions insistantes, provocantes, qui mettent les lecteurs face à une urgence à comprendre et à vivre, en vérité. C A
Depuis j'ai trouvé, par hasard, sur wikipedia un article sur le poète péruvien, César Vallejo (Santiago,1892 - Paris, 1938), l'une des figures les plus importantes de la poésie hispano-américaine du xxe siècle.
On pourrait y voir un lien avec Jacques Engelmann, qui lui aussi dépasse sa conception tragique et pessimiste du monde pour se sentir solidaire de tous ceux qui souffrent. Vallejo a espéré que l'action du peuple permettrait d’en finir avec les injustices (...) qui répandent la souffrance à travers le monde.