114 Pendant toutes ces vacances nervaliennes...
Pendant toutes ces vacances,
je semblais parfois heureuse, parfois triste. Je ne faisais pas attention aux couleurs du ciel, à une indéfinissable douceur de l'air, à mes doigts aux articulations gonflées. Mes pensées étaient indifférentes, égales, insistantes
parfois sur fond de fresques antiques. L'antienne murmurait que j'étais d'un temps d'avant d'un temps des débuts et des mises en place. Le jardin où j'aurais voulu me trouver vivait en moi. Je vivais en lui, par la présence de gueules de loup que j'avais aidé à enraciner. Un jour un petit oiseau sautilla sur le mur d'en face. Il sembla me dire : "Que fais-tu là ?",considérant le livre qui traînait sur mes genoux.
Petit coeur tout seul
A l'abandon
Au bout d'une pique en bois
Sur une table
posé rouge lisse
Je me mis à le feuilleter, je redevenais lectrice. Le monde des mots faisait basculer le jardin dans les grandes pages palimpsestes des troncs de forêts démembrées. "Petit oiseau, vois-tu, je rêve", lui dis-je, en ouvrant les yeux pour m'enfuir dans l'éclat de son oeil à lui. Il était parti. Je me levai alors et j'avançai sans hésiter sur le fil... un pas, puis un autre, un autre et encore...
Nue, sans peur.