Quand se rejoue d'une certaine façon ...( carnet de bord)

QUAND SE REJOUE, D’UNE CERTAINE FACON L’HISTOIRE DU PARADIS PERDU…

 

 

 

 

CARNET  DE  BORD

 

 

 

Essayons de simplifier les choses pour les rendre supportables. Il y a encore quelques jours, il existait, cahin caha, un petit groupe de gens rassemblés par le désir de donner un petit spectacle théâtral, à la fin du printemps. Groupe devenu plus hétéroclite, de par la politique d'ouverture menée par la structure, (un Centre Culturel) dont dépend ce groupe, mais, que je ressentais comme plutôt léger à penser, et qui aujourd'hui m'est devenu impensable.

 Le penser c'est risquer la brûlure. 

Jeudi 23 : 19h30 L et moi  arrivons au Centre. A attend déjà devant le porte. Les autres semblent avoir oublié que la séance devait commencer plus tôt, suite à la prise de conscience que le spectacle approchait et qu'il fallait donc se voir davantage. Arrivée d’E. qui apporte CD et œuvres qu'elle aime et aimerait dire un jour en public. E. me propose de lire un poème qu'elle a appris et qu'elle voudrait entendre "de l'extérieur". Je m'exécute avec plaisir. Puis c'est au tour de A qui lit un deuxième texte. Y. arrive. La répétition commence.
Il manque 3 personnes : D. et M (retenus par leur travail) et  U. qui en l'absence de D et M ses partenaires dans les deux piécettes qu'elle joue a préféré répéter chez elle.
Un dialogue de JM Ribes. L et Y répètent. E. joue le rôle qui est désormais le sien de conseillère à la mise en scène et costumière.  Sa présence, toute récente, rapproche de la vérité de la scène et du monde du spectacle. Son expérience dans le domaine de la danse et sa gentillesse sont  un vrai "plus" dans notre petit groupe.

Dès le début de la répétition mes joues sont cramoisies. Je me sens « partir » dans ce que je qualifie de réflexe paranoïaque. Impossible à arrêter. Cela n'arrive pas souvent, mais je dois en convenir, … ça arrive. En général, c'est dévastateur. Je me comporte de façon puérile, et à mon âge...

A ma décharge,… quand j'ai voulu faire écouter un extrait musical qui, à mon avis, aurait pu accompagner un  des textes que nous montons, il n'y a eu aucun écho à ma proposition. J'ai eu l'impression d'être transparente et même incongrue...J'ai remballé brusquement mon appareil et mon CD. Et je me suis mise en retrait. J'avais aussi voulu, un peu avant, parler de dates ultérieures de répétitions...Aucune réaction non plus...
Personne ne semble avoir besoin de moi...l'animatrice (!!!), mot, du côté flou duquel je ne finis pas de me rendre compte...
A et Y répètent donc. Y  se plaint de ne pas s'en sortir avec cette scène. Elle souffle beaucoup. En apparence, elle veut des conseils et n'en accepte aucun. Ici il faut préciser que Y est arrivée il y a environ 2 mois d'une "vraie" troupe avec des répétitions interminables, des stages, un metteur en scène, un "vrai", un œil qui vous dit, avec une autorité incontestable, un professionnalisme qui force le respect, si ce que vous faites est bien ou pas. J'ai eu l'impression dès son arrivée qu'elle serait insatisfaite des aspects informels et amateurs exacerbés que j'essaie d'entretenir dans cette équipe, et  donc,  qu'elle ne resterait pas.
Mais, je me suis trompée. 
Y est assidue, a apporté des textes de Dubillard et de Ribes, ceux qui feront la trame du spectacle de juin. Ribes, pour moi, est un peu trop à la mode, je n'ai pas une affection particulière pour ce type de comique, somme toute assez facile, mais il paraît que "dans ces temps de crise", il faut faire rire les gens. Ce n'est sans doute pas faux. Si l'on veut déplacer un public, mieux vaut les attirer avec le rire. Mon rire à moi s'enclenche très facilement, souvent à contretemps,  mais dans le domaine du théâtre, lecture, écriture et jeu, personnellement, je n'"accroche" qu'au tragique.
Bref. OK pour Ribes. Sélection, distribution. Il ne reste rien pour moi. Qu'à cela ne tienne je dirai un texte "bateau" d'Anne-Marie Carrière sur "le démon de midi". Mieux que rien. Comme ça, pendant les répétitions je peux me consacrer aux autres. Je m'exerce à la maison.

La répétition continue. La fin n'est pas encore mise en place. Plusieurs propositions. Comme d'habitude, tous ceux qui sont là donnent leur avis. Moi aussi. Ma proposition est rejetée sans appel, d'un revers de main. Mais 32 ans d'enseignement avec des ados et 3 enfants "élevés", ça vous forge une femme. Je laisse faire.
 
Je m'appuie aussi, moralement, sur ma pratique du théâtre (à plusieurs niveaux) depuis des décennies pour rapidement me dire que ce n'est pas possible que j'ai complètement tort et que même si c'est le cas, les "autres" pourraient faire semblant au moins, d'explorer mon idée. Bof. Bof.

Bref, le résultat n'est pas trop mauvais.  

Deuxième sketch. Y et A. C'est un trilogue, mais D étant absente, L. lancera le texte à sa place.

Là, je suis  carrément inutile. Tout se passe sans moi. Des répétitions, qui durent jusqu'à ce que la fatigue vous terrasse ont en fait eu lieu à l'extérieur, chez E. Amusant, cela fera rire, à n'en pas douter, façon Ruquier. Parisien...Ouf ! Là on touche à du vrai, du bon, du nanan...Chacun sait qu'à Metz, il n'est " bon bec que de Paris"...
Dynamique. Rythmé. Tout est prévu. Les costumes, les musiques etc. L'absence de D qui a aussi participé aux répétitions pendant les vacances scolaires (ce qui explique qu'elle n'ait plus besoin...de venir le jeudi, je me demande, si ce n'est pas le cas des 2 autres...)  
Je me mets à l'écart...Sors par deux fois. La moutarde me monte au nez. En plus de mes joues écarlates...ça fait beaucoup. Calme-toi, ma fille.
 Quand je reviens, je suis piquante. Mais sur scène aucun trouble apparent. J'ai appris un peu plus tard qu'ils avaient été déstabilises, et...le gros mot est lâché "culpabilisées" par mes "absences" courtes, il faut le dire...Je laisse le [e] au participe car L ne l'a pas été. Heureusement... Ciel, c'est mon mari...
 Y a déclaré, en cherchant de l'aide dans les yeux de A et de E, que mon attitude, depuis le début la mettait mal à l'aise quand elle lui donnait la réplique. (« Lui », c’est E.)  Je ne m'en rends pas compte. Je fais, et lui aussi, je crois, même si les choses sont certainement plus complexe qu'il n'y paraît, la différence entre la personne et le comédien...Et puis Ribes est vraiment trop grinçant pour laisser place à une émotion qui puisse engendrer une confusion des sentiments. C'est un risque, bien sûr, mais comme je ne ressens pas de signal d'alarme interne, quand bien même me tromperais-je, mon attitude n'est pas "chargée", comme elle l'était ce jour là...pour, à l'évidence, de toutes autres raisons.

Si donc déstabilisation il y a eu, ce que je n'ai pas le droit de contester, il faut avouer qu'elles ont bien caché leur jeu...Meilleures comédiennes que moi...Ou alors prêtes à l'affrontement !!!

 Quelques reproches cinglants plus tard. Des menaces de départ..."Puisque c'est comme ça, nous on n'aime pas les histoires... La vie est déjà assez dure comme ça...Avec toutes les horreurs qu'il y a dans le monde...Et que si on fait un spectacle autant qu'il soit bien..." J'attendais le couplet sur  le respect du théâtre, du public...Puisqu'avant, de toute évidence, ces "valeurs" (gnagnagna), je ne savais pas ce que c'était...J'ai évidemment (à temps, je me suis rappelée que j'étais l'animatrice de l'atelier depuis 4 ans et que j'avais déjà vécu une sinistre expérience similaire il y a deux ans : spectacle mené à bien mais groupe démantelé) fait amende honorable et patati et patata. Les autres se sont apaisées aussi. La méchante Lucie  (comme aurait dit ma mère) faiseuse d'histoires...était là. Y. formulait ses reproches au nom des autres qui, je l'ai supposé,  n'osaient rien dire et ont attendu ce porte parole. "Y a Bon Dieu", quand même.

A ce jour (dimanche)... Franchement pour revenir dans cette salle, il faudra que je me fasse violence. Il ne se passe pas un jour sans que sous un prétexte quelconque je ne verse quelques larmes... (La pauvrette...).

 

A suivre…



 

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