Sur le malentendu d'Albert CAMUS, liens avec d'autres de ses oeuvres ( trouvé sur critiqueslibres.com écrit par Lucien)

Publié le par Claire

L'histoire du Tchécoslovaque

Dans «L'étranger», Meursault n’a que peu d’occasions de distraction, seul dans sa cellule. Il partage son temps entre le sommeil, les repas, les besoins naturels, les souvenirs et «l’histoire du Tchécoslovaque».
Il a trouvé, entre sa paillasse et la planche de son lit, un vieux morceau de journal jauni relatant un fait divers navrant : un homme parti faire fortune revient au bout de 25 ans, riche et marié, dans son village natal. Pour surprendre sa mère et sa soeur qui tiennent un hôtel, il leur dissimule son identité et prend une chambre comme n'importe quel voyageur. Mais l'histoire se termine très mal : les tenancières assassinent le riche étranger pour le voler. Le matin, la femme arrive, révèle l'identité du voyageur. La mère se pend. La fille se jette dans un puits.

Meursault relit des milliers de fois cette histoire qu’il trouve naturelle d’un côté, invraisemblable de l’autre : c’est la définition même de l’absurde. Il trouve que «le voyageur l’avait un peu mérité et qu’il ne faut jamais jouer».

ce en quoi il est lui-même absurde car qu’a-t-il fait d’autre? Qu’a-t-il fait sinon jouer sa vie à la roulette russe?

Peu de temps après, Camus donnait une forme théâtrale à ce qui n’est qu'anecdotique dans «L'étranger» : cinq personnages en tout pour un huis clos tendu où l'essentiel tient dans les mots.

Théâtre engagé. Message à faire passer à travers le fils, Jan, celui qui est parti, celui qui a connu le bonheur et l'amour, celui qui a vu la mer et le soleil, l’éternel enfant joueur puni d'aucun crime, innocent sacrifié & si, son crime, le bonheur ; la mère, la pleureuse, l'éplorée, la Pietà, la résignée, belle figure slave, belle et pauvre esclave ;

la sœur, Martha, celle qui est restée, celle qui a végété, celle qui n’a pas vécu sa vie, celle qui espère encore, dure, froide, blanche, pure, glacée & Martha, lors de la création en 1944, interprétée par l'amour de Camus, la superbe Maria Casarès ;
la femme, Maria, pâle apparition finale, dea ex machina tout juste présente pour faire basculer le premier domino
d’une avalanche qui broiera les deux autres femmes ; le vieux domestique, enfin, sorte de Godot présent mais muet, ersatz de dieu méchant qui pourrait tout arrêter mais garde son devoir de réserve, et dont la seule parole clôt la pièce sur une fin de non-recevoir : à la demande d'aide que lui adresse une suppliante et douloureuse Maria, le fantôme inutile répond «d’une voix nette et ferme» : «Non!»
Trois actes oppressants. Si le titre n’était pas pris par Mauriac, on pourrait sous-titrer cette pièce «Le désert de l’amour». Et puis ces dialogues incessants, parfois lourds, destinés à servir une démonstration : le théâtre de Camus a vieilli, beaucoup plus que ses récits.

Une réponse de Jules à Lucien 

(...)Il est aussi intéressant de voir que cette histoire du Tchécoslovaque revient dans le roman posthume de Camus "La mort heureuse" et là aussi Zaghreus tente son assassin comme s'il voulait vraiment le pousser à le tuer. Là aussi c'est en Tchécoslovaquie que son assassin va d'abord se rendre immédiatement après le meurtre...

 

Publié dans citations. Notes.

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