Notes prises dans un article (de 2019), en lien, de Frédéric Lordon sur les ''non-limites'' du capitalisme néolibéral. Illustration : le procès France Télécom. 2 liens : 1) blog.mondediplo.net 2) dailymotion.com Bande Annonce du film de Nicolas Klotz ( 2007) '' La question humaine'', adapté du récit de François Emmanuel, dont il a gardé le titre
Les sociopathes (de France Télécom à Macron)
Concédons d'emblée que la catégorie de " sociopathe " n'est sans doute pas ce qu'on fait de mieux en la matière. Ici, du moins à condition de lui donner ce qu'il faut de prolongements, elle su...
https://blog.mondediplo.net/les-sociopathes-de-france-telecom-a-macron
Article du 31 mai 2019
Article à lire, pour mettre des mots sur ce qui apparaît comme une/des fatalité/s
pour que ceux qui n'ont plus eu que le suicide, comme dernier recours, dans un monde devenu inhumain
ne soient pas que des statistiques ou des dégats collatéraux.
Guerre, extermination, invisibilité d'un pouvoir central auquel on ne peut échapper, grâce aux multiples relais que sont les intermédiaires ( des grands chefs aux plus petits ) qui veulent tous bien faire et "obéir" aux "objectifs" qu'ils ont intégrés comme étant des vérités, objectifs à atteindre... par tous les moyens, ce qui permettra d'accroître "l'espace vital" du capitalisme.
Des comparaisons qui font froid dans le dos, mais qui mettent bien en perspective des situations auxquelles nous sommes confronté·e·s tous les jours et qui parfois nous paraissent si naturelles, si normales, si allant de soi.
(...) " « Sociopathe » désigne cette catégorie d’individus étrangers à toute régulation de la moralité élémentaire et parfaitement insensibles à la souffrance d’autrui, on pourrait même dire à l’humanité des hommes. "(...)
Prise de notes dans le texte, en lien, de Frédéric Lordon (sur le procès France Télécom)
- Certains dirigeants avouent avoir répété que les départs se feraient ''par la porte ou par la fenêtre''
- On parle aussi négligemment de ce que le sociologue David Phillips a nommé ''l'effet Werther''*, ou de ''suicide mimétique''. Il conclut à un lien direct entre exposition dans les médias et hausse du taux de suicides.
*Une vague de suicides, par arme à feu, se serait produite en Europe lors de la parution du roman de Goethe, Les souffrances du Jeune Werther (1774).
- Ils évoquent aussi une « crise médiatique », regrettable en termes de communication, du fait de ''réactions exagérément sensibles de syndicalistes, d’inspecteurs et de médecins du travail''.
La chosification des hommes (''inscrite dans les schèmes fondamentaux de la rationalité instrumentale'') : c’est cela le propre du sociopathique et (...) du capitalisme néolibéral, qui crée dans les entreprises le poste de ''ressources humaines''.
- Ils n’auraient fait que respecter la « nécessité économique », sans doute regrettable à certains égards (...) mais dont ils ne seraient, en se prévalant de ''la loi du marché'' que les desservants quasi-mécaniques.
Où est le problème ? On jette bien des objets !
Car l’histoire (comprise comme ayant des structures sociales particulières à chaque époque), enseigne tout ce en quoi elle est capable de transformer les hommes, tout ce qu’il lui est possible (...) de leur faire faire.
Le néolibéralisme produit son type d'hommes.
Les structures du néolibéralisme, ont levé toutes les limites aux menées du capital. Quand la finance est déréglementée et impose le règne des actionnaires internationaux, quand la concurrence, cœur de la construction européenne est promue mondialement par l’O M C, (...) quand le droit du travail rapproche tendanciellement le statut du travail de celui de la liquidité financière, quand le capital a pris le pli de pouvoir faire ce qu’il veut parce que plus aucune règle ne le retient dans ses mouvements, comment la psyché des capitalistes n’exprimerait-elle pas à son tour cette nouvelle disposition, cette nouvelle habitude que plus rien ne fasse obstacle ?
(...) Les humains sont à l’image des structures : déchaînés si les structures sont déchaînantes, tout-permis si les structures leur permettent tout.
Alors le poison des structures imbibe de plus en plus profondément les strates sociales de l’entreprise, (...)
C’est que le merveilleux idéal de la concurrence généralisée charge le travail d’enjeux de vie ou de mort sociale.
Toute l’organisation est mise sous tension par l’impératif de la valeur pour l’actionnaire dans un contexte de concurrence externe suraiguë, où le jeu du profit se joue à la réduction de la masse salariale.
La guerre concurrentielle externe se réfracte au sein de l’organisation en guerre concurrentielle interne.
Quand chacun lutte pour sa propre survie, (...) la plus extrême violence se répand partout : réduire les individus à devoir lutter pour leurs intérêts vitaux, c’est organiser leur devenir-sociopathe : plus rien ne les intéresse que leur autoconservation, dont les « autres » deviendront s’il le faut le simple moyen.
Les « objectifs » sont, pour les individus, la manière dont la guerre leur tombe dessus, ce à quoi ils se trouvent mis en demeure d’accrocher leur survie. Pour les « objectifs », ils se feront donc des kapos.
Les impulsions sociopathiques venues du sommet descendent la hiérarchie, et sont relayées par les couches intermédiaires.
À la violence commandée par le haut, cependant, beaucoup ajoutent la peur et pour certains une terrible souffrance de se voir faire ce qu’ils sont enjoints de faire.
Agamben, a vu profondément juste, avec sa théorie du camp et de l’état d’exception. Dans un camp tout devient possible, en utilisant le vocabulaire du contrôle actionnarial : objectifs, productivité, benchmarking, rating, monitoring, reporting.
Pour se dédouaner il suffira d'adapter à la purge d’entreprise la « courbe de deuil », dite aussi courbe de Kübler-Ross, ce modèle psychologique, émotionnel qui décrit les cinq étapes traversées par quelqu'un qui fait face à un deuil ou à une perte, - ici, sa propre mort, sociale... : déni, colère, négociation, dépression et acceptation.
''Ils vont finir par dire oui'', disait Hollande.
''ça passe, ça passe'', répétait Edouard Philippe. Le tout avec ''le même sourire entre stupide et effrayant, la même éclatante et terrifiante satisfaction de soi'' : Que voulez-vous ? Ils sont courageux, ils assument !
(À revoir La question humaine, film de Nicolas Klotz, qui, déjà, en 2007 invitait à penser les réminiscences de l’histoire, jusqu’à la possibilité de ses répétitions, et par-dessus tout le risque (...) de méconnaître jusqu’où peuvent emmener des commencements d’abord trouvés sans importance.)
La question humaine Bande-annonce VF
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