Texte à bribes autobiographiques consolidées par un rempart de phrases psy sur le complexe d'Electre
Le jour où je tombais, (par hasard ? Non. Puisque je suis dans une interminable quête de maîtres à penser…) sur l’article dont je vais vous recopier un extrait, inséré dans un commentaire spéculaire, je pensais enfin avoir tout compris sur moi.
C’est vrai que, à la réflexion, je peux douter du fait que « comprendre » m’apporte quoi que ce soit. Et si, au contraire, j’y perdais quelque chose ? Le goût de me lever le matin, par exemple, pendant que ''les autres'' dorment encore. Le bonheur de chercher le texte qui me rendra à moi-même, qui lui de façon définitive supprimera mes doutes et me ramènera à l’unité. Car c’est certainement là, quand on a recollé, ressoudé, rapiécé, raccommodé et réparé et restauré que se trouve la vérité, que je recherche.
« Si le complexe d’Electre s’est mal résolu dans l’enfance, alors la fille, contrairement au garçon, s’inscrit dans un rapport de soumission totale aux règles. »
Complexe d’Electre ! Magnifique, d’un côté. J’ai toujours adoré ces filles extrêmes que sont Electre et Antigone. Cette inclination serait-elle révélatrice …de…de…Et voilà !
« Les règles ne deviennent plus un moyen de trouver ce qu’elle désire, mais une fin en soi, l’objet même du désir. »
Désespérant, de l’autre (côté)…
La suite ? « Elle obéit désespérément, y compris à un mari parfois irrationnel. »
Je me permets de livrer ici une expérience récente.
Même si je ne suis pas « l’obéissance » incarnée, (« désespérément », voilà peut-être bien le terme de trop, en ce qui me concerne, mais malgré tout…)… j’ai quand même tendance à m’incliner (en maugréant, évidemment) quand mon époux, par exemple, décide que le moment est venu d’exécuter telle ou telle tâche ménagère. Or je n’aime pas, mais pas du tout, faire le ménage. En particulier, en ce moment. La maison est en travaux. Il faut indéfiniment recommencer les mêmes tâches. Déplacer les outils, les objets, les meubles, etc.
Extrait de mon journal intime : « Mais hier les choses ont pris une autre tournure. L’irrationnel ayant pris possession de lui, suite à je ne sais quel mot malheureux, à quel délire verbal et moralisateur dont je suis coutumière, ou tout bêtement suite à la réflexion perfide d’un voisin ou même du balayeur de notre quartier, qui pendant qu’il passe mollement un balai aux longs poils sur le chemin de terre qui mène à la maison laisse son œil exercé pénétrer le double vitrage de nos fenêtres sans rideaux.
Il a brutalement décidé que ce qui était visible devait être caché. Surtout dans la chambre conjugale. Plus rien sur « ton bureau ». Ce dernier est constitué d’une lourde planche en équilibre sur deux commodes identiques. Je n’ai jamais vraiment pu l’utiliser parce que l’exigüité de la pièce ne permet pas d’installer une chaise et donc, pour écrire…Lire c’est possible, puisqu’on peut lire allongé. Je lis au lit.
Ce bureau me servait de dépôt. Livres, courrier en souffrance, verroterie, feuilles de papier, vide poche, vieux sucres ramenés des pâtisseries ou bar dans lesquels j’avais bu un expresso.
J’y préparais aussi ma tenue « du lendemain », afin de n’avoir pas besoin de réfléchir, au moment où les réveils donneraient le signal du départ de la journée. Le Top ! Toute cette accumulation devait disparaître. J’ai eu beau demander un délai, il est resté inflexible. Son visage semblait maigre. Sec. Je n’ai pu trouver grâce à ses yeux dans lesquels se reflétait le tourment qui l’agitait et dont je ne connaissais pas la cause. Pour utiliser une expression toute faite et actuelle, il ne « communique » jamais sur ses états d’âme. Je fais généralement les questions et les réponses. Ce qui souvent l’arrange. Je ne connaîtrai jamais la raison de cet engouement, à ce moment précis pour le « zéro signe visible » de vie dans la chambre à coucher. « - Sinon, elle ne fait rien. Toujours devant son ordinateur.
- Et qui s’occupe des repas, de la vaisselle, du linge, etc. … de la vie quotidienne, de la conversation, des enfants ? Ah ! Ça ne compte pas ! C’est normal…
- Tu n’as plus besoin de tes bouquins, là. Qui nous encombrent. Tes feuilles, partout. Il faut s’habituer, dès maintenant à vivre dans un local plus étroit. On va vendre la maison pour aller vivre dans un camping car. Itinérant. Tes livres, tu les emprunteras dans des bibliothèques etc.etc.
- D’accord, d’accord. Mais oui, on verra... Les travaux d’abord, on avisera ensuite. 1 »
Je me suis acquittée de la mission qui m’avait été imposée. Devant ce mur qu’il était devenu, je sentais la violence monter en moi. J’ai déplacé sans douceur tous les objets désignés. J’ai vidé les tiroirs. Poussé « le bureau », enfin nu,vidé, hors de la pièce, mis tout ce qui m’appartenait, sans le trier, ni le classer dans l’armoire que j’ai fermée à clé. Tout était net. J’ai pris ma montre, mon portable et je suis allée m’installer dans la chambre de ma fille, que nous allons vider (je parle de la chambre) aussi un jour prochain, puisqu’elle va vivre ailleurs, pour terminer ses études. En attendant… »
Elle obéit donc, même en rechignant, même violemment. Elle obéit.
Mais se venge. Prenant le parti des objets relégués et quitte elle aussi la chambre conjugale. 2 Plus aucun désordre.
Fin de la parenthèse. S’il-vous-plaît, Docteur, avez-vous ainsi la preuve irréfutable de ma névrose ? Une vraie Electre aurait-elle réagi autrement ?
…sur l’air de « Je cherche fortune …Je cherche des règles, tout au long de ma vie…dans ma maison le soir… »
Nous nous égarons…Examinons maintenant la suite de cet excellent article « Elle trouvera une compensation dans la surabondance d’enfants et projettera tout son désir frustré sur eux. » Nous (Mon époux- terme respectueux pour épouse soucieuse des convenances… et moi) avons eu, désiré, trois enfants. « (Le cas échéant) en tant que mère elle condamnera ses enfants à ne jamais la tuer, jouant de leur dépendance affective naturelle qui lui permettra de les entretenir dans le rapport fusionnel ancestral. »
Rapport fusionnel ancestral … Chaud. Ces mots là m’épuisent. « Dépendance affective ». Je suis sûre que j’ai failli de ce côté-là.
Et ce n’est pas fini, la sentence tombe : « Elle se vengera ainsi de son mari injuste en faisant que ses garçons préfèreront toujours leur mère à leur père ».
Franchement, me préférer à leur père, je ne sais pas, je ne le crois pas, ( enfin…) je ne suis pas si fiable que ça, mais que je sois plus abordable, que je me sois chargée de tout ce qui était en relation, pour faire simple, avec le scolaire, (l’éducation avec comme quasiment seul visée : les études) , oui.
Que je justifie tout le temps mes positions, que j’ai trop lu, sans formation spécifique, en littéraire seulement, -donc, « perversement »- Dolto et Cie ? Oui aussi. Je suis donc vraiment fatigante, usante…Ils ne me critiquent jamais frontalement, certes. Les relations sont ( Note de relecture des années plus tard, en fait "étaient" ) plus faciles avec moi, (allons vers la confidence…suis sûre d’être moins « ..iante », mais autrement sans doute plus'' opaque''... Certes. Je étais et reste prof. Vocation…ou alors, c'est comme le vélo...
La suite : « ils ne sauront jamais admirer le père et donc obéir à des règles autres que tyranniques. »…Je ne la comprends pas bien. C’est péremptoire, tout ça ; admirer leur père, je ne vois pas pourquoi ils ne le feraient pas. Il n’y a pas que le scolaire dans la vie, pas que la recherche masturbatoirement narcissique que je représente. Et rien que, déjà, pour sa capacité à me supporter...Je suis humble, là. Hein. ? « Fausse humilité… Preuve qu’il est mal résolu, mon complexe ? Mèèèèrde…
« Ses filles…(sa fille, j’en ai une), … s’enfermeront(ra) dans l’image de la mère et reproduiront(ra) immanquablement le même schéma qu’elle. »
Bien, bien, bien, pour l’instant, dans les faits, factuellement pourrait-on dire, elle ne prend pas le même chemin que moi. Elle vagabonde davantage sentimentalement. Physiquement, elle a moins de défauts que moi. Même si nous avons quelques points communs, enfin, je crois ( du religieux, maintenant) ! Et elle intègre, à la rentrée une grande école, ce qui n’a pas été mon cas. Je me suis contentée de la fac des lettres de ma ville.
Passons, passons…Voilà qui me semble intéressant « Le rapport pulsionnel à un art va permettre à l’individu de réels progrès. » C’est tout moi, ça. Je me suis mise à l’écriture, malgré les propos ironiques…Tout le monde écrit…Tu veux aussi (Oh ! Oh ! Oh ! C’est vraiment hilarant…) fréquenter les salons du livre… « Mais il sera toujours dans le travail de l’acquisition de la technique qu’il cherche à maîtriser. » Mon Dieu, c’est moi aussi, peut-être …Car je suis rongée par le doute. Mon style est convenu, bourré de clichés.« … Sa vie étant trop souvent déterminée par ses pulsions, [elle] ne parvient pas à faire que ce qu’[elle] fait relève d’un désir, c’est-à-dire d’un projet : c’est un travail sans créativité… » Et voilà. L’auteur le dit lui-même. Je prends quelques mots de la suite : « enfermée … dans une tragédie pulsionnelle. » Me voilà toute décrite. Tragédie. Difficulté à aboutir. Des débuts, beaucoup, trop. Mais aller au bout d’un « projet ».
C’est bien simple, on croirait entendre un Proviseur de Lycée, un jour de pré rentrée. « Ayez des projets… Construisez des projets qui tiennent la route et nous vous suivrons…Croyez-le. Un projet bien ficelé, aboutit toujours…ET je sais ce que je dis… » Bien ficelé, bien ligoté. Arrimé sur les grands principes, les grandes règles édictées par un deus absconditus quelconque. « C’est ce que tu aimes, alors ? La fange dans laquelle tu te roules. La preuve ! « Sans créativité. » Je ressasse, dès que je repère une brèche. Je ….''m’engouffre'' évidemment. L’expression toute faite est arrivée (comme la bière de mars ou le beaujolais nouveau) et pour faire bonne mesure (encore une) à la vitesse d’un cheval au galop. Un chapelet…Je vous disais. « Sans créativité ».
« Le travail …de l’écrivain, l’activité libre en général est … plus qu’un désir … plus…, c’est un projet de vie. » Là aussi, l'auteur le dit. On passe du projet tout court, avec des critères de faisabilité quantifiable, au « projet de vie ».
J’ai, enfin, les jambes coupées. Je suis en panne. Plus envie d’écrire.
C’est vraiment la preuve que j’ai besoin de règles à ma mesure. Pas trop ambitieuses. Chacun à sa place. Je suis sans doute un peu con con. Electrement complexée.
Et si j’étais tout simplement lucide ? Car, écoutons la fin… » En toute chose, il faut considérer la fin », c’est de La Fontaine, je crois (ce n’est pas mon maître à penser, je ne suis pas hédoniste, même si j’aimerais l’être. Ach ! Pulsion…Et puis est-ce de lui ?) … « désenchainé du fond affectif commun, l’artiste »… ça, non, ce n’est pas là notre cas, nous l’avons vu, ni « artiste », ni « désenchainé »…Poursuivons… « n’a plus qu’à assumer de vivre dans sa lucidité. » C’est ce que je fais, non ? Me voilà bien contente.
Satisfaite. « Lucidité…Lucidité… » C’est vrai qu’on peut encore discuter, ergoter…Mais nous allons en rester là.
Pourquoi pas ?
Dimanche 16 août2008
PS 1 du 30 octobre 2024. Nous sommes toujours ensemble, n'avons toujours pas quitté la maison, encore en travaux.
PS 2 du 30 octobre 2008. J'ai oublié de dire que 2 jours plus tard j'avais subrepticement, je crois, ce qui signifie en fait sans préavis, regagné la chambre conjugale : le matelas y est meilleur. Cette recherche du confort est certainement à analyser.🤔
(Texte publié dans le recueil ''Mises en scène de femmes'' -TheBookEdition-)